Archives mensuelles : juin 2013

La poésie ? Mais, elle vous emmerde, la poésie !

Kandinsky, Fugue (1914)

Fugue (1914)

« Je crois que la philosophie future, outre l’essence des choses, étudiera aussi leur esprit avec une particulière attention. Ainsi sera créée l’atmosphère qui rendra les hommes en général capables de sentir l’esprit des choses de manière inconsciente, ce qui explique le plaisir que prend le public à l’art figuratif. Mais c’est la condition pour que les hommes en général aient l’expérience du Spirituel dans les choses matérielles, et plus tard, du Spirituel dans les choses abstraites. Et c’est grâce à cette nouvelle capacité qui sera sous le signe de « l’Esprit » que l’on arrive à la jouissance de l’art abstrait, c’est-à-dire absolu. »

Kandinsky, Rückblicke, 1913

Léo Ferré, Les poètes de sept ans [Rimbaud] (live à l’Olympia)

Le rêve, c’est elle. Bien plus qu’un songe, elle est rêve éveillé. Elle a le temps. Le temps, elle l’est. Par-delà le vôtre, le mien, elle est le liant, submergée au-delà des nuages. Telle une musique suspendue venue d’on ne sait trop où qui suggère, jamais n’impose, elle est la religion ouverte de ceux qui ne croient pas, qui parle à ce que nous étions avant que nous ne soyons au monde. Elle est l’âme d’enfant qui aux tourments a survécu. Elle est le courbe, le distendu, le sinueux, l’aigu, l’oblique, l’invisible, l’obtus, elle est tout cela, mais pas le droit !

Der Sturm (1910-1932)

Schönberg, Verklärte nacht

Elle est la beauté sublimée des formes, l’éclatante harmonie des pigments, l’assassine mélopée de la foudre, le nu de la psyché qui s’habille du souffle vital né de l’étincelle qui a propulsé la flamme d’énergie essentielle. Elle est l’abondance face à l’économie. Elle est l’oiseau que cherche à décimer le chat, marri du fait que lui jamais ne voltigera dans cette apesanteur qui, légère, se joue de la frivolité comme de l’abus de réalité. Elle est l’irréductibilité des mots aux valeurs, aux chapelets, aux chiffres et aux codes. Elle est existence, elle est résistance, cette amante insoumise qui à tous les supports se prête sans jamais se donner à aucun…

Léo Ferré, L’âge d’or

Ferré 3

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« Quand ils ont aboli la démocratie en Grèce, je n’ai rien dit. Je n’étais pas Grec… »

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Jeunesse européenne, crève !

Ton sacrifice est nécessaire à notre rêve.

Multinations et déraison, il est à eux, notre pognon.

La BCE, le FMI, la Banque mondiale et l’OMC,

Tous des rapaces, toutes au service des banques privées !

Le 1 %, vous le détestez…

Que vous plaignez-vous alors d’en payer 4, 6, 8, 10, 24 ?!

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1 billion 800 milliards pour les banques

6 milliards pour le chômage des jeunes.

CHERCHEZ L’ERREUR…

LA TAXE TOBIN, DIOGENIAL !!!

Tobin (Chaosmen)

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Is there a meaning to « Flat Earth Society » ?…

QUIZZ DE FIN DE SEMAINE

« La victoire par le rire, le rire pour la victoire ! »

Il y a deux jours, à l’université de Georgetown (W,DC), la face présentable de l’Empire a affirmé que « l’on ne peut plus perdre son temps en réunions de la Société de la Terre plate » (FES, en anglais), propos qu’il avait déjà tenus l’an dernier à pareil moment. Il y instrumentalisait une fois encore le fameux changement climatique en insistant pour en finir avec le pétrole comme moteur principal de l’approvisionnement énergétique et en recourant aux énergies qu’il a qualifiées de propres.

Ce faisant, il plaidait en faveur…

1/ d’un accroissement de l’exploitation du gaz de schiste, qui a connu, comme l’a indiqué Gasland, une envolée sous son premier mandat, pour la plus grande joie des petits propriétaires terriens ;

http://www.youtube.com/watch?v=z0fAsFQsFAs

2/ de l’installation d’une éolienne dans le parc de la Blanche-Maison ;

3/ du démantèlement du réacteur nucléaire installé sous le Pentagone, en compensation duquel la firme Exelon (83.000 $ de contributions financières lors de la campagne 2012) sera autorisée à accroître de deux unités supplémentaires son parc de centrales nucléaires, qui en compte actuellement seize ;

http://www.politico.com/news/stories/0512/76283.html

4/ de l’arrestation pour propos non convenables, en vertu du « Arrest Activists Act » (une annexe au Patriot Act votée durant son premier mandat d’Empereur smart), de Ralph Nader, qui, face à Amy Goodman, déclarait, en janvier 2012, qu’ « Obama dit une chose et fait son contraire », ce qui pourrait valoir à l’intéressé un exil à Guantanamo, aux frais de la NSIABI ;

http://www.youtube.com/watch?v=bWupFxpU1yQ

5/ de l’arrêt de la coopération renforcée entre la partie extrême-occidentale de l’Empire avec l’Arabie Saoudite, donc de l’annulation du contrat d’armement d’une valeur de 10 milliards de $ finalisé fin avril dernier avec celle-ci et les Emirats.

“On Monday, US secretary of Defence Chuck Hagel confirmed that arms deals worth US $ 10 billion would be signed with Israel, Saudi Arabia and the United Arab Emirates (UAE) to bolster their forces for any future conflict with Iran—those are the same states now leading moves against the regime of Bashar al-Assad.”

http://www.wsws.org/en/articles/2013/04/25/arms-a25.html

La subtile allusion de l’Empereur à la “Flat Earth Society” visait en fait…

1/ la frange radicale de l’Opus Dei (c’est dire…), qui se plaît, en cercle restreint, à rappeler que les enseignements de Ptolémée, au IIe siècle après l’Illumination, lesquels se basaient sur des observations qui remontaient jusqu’au VIe siècle avant elle, n’étaient en fait que de la CoIntelPro importée en Occident par l’espion chinois athée Pei Xiu (prononcez : « peille chou », un chic type quoi) ;

2/ un groupement d’étudiants de la Ivy League qui militent poliment (et en costard, svp !) pour la réhabilitation du « make love, not war » soixante-huitard. Leur slogan ? « In a flat position, you can’t hurt anyone, but damn, can you fuck ! » Les Femen se sont déclarées intéressées par des happenings publics conjoints… ;

3/ un obscur groupement néonazi qui plaide pour de vrai, comme le faisait Randy Newman pour de faux dans « Political Science », pour le bombardement généralisé de tout l’Etranger, histoire de rendre la Terre plate ;

http://www.youtube.com/watch?v=4iiv-6fMKyY

4/ les Skulls and Bones, la société secrète issue de l’université de Yale, à laquelle appartiennent tant Georgie B que Johnny Kerr, dont des traîtres prétendent aujourd’hui que son mode d’initiation initial consiste à traîner le postulant (couché) d’un bout à l’autre de la salle du Temple comme un sac à patates ;

5/ 

TAKE OFF THEIR MASKS. EXPOSE MORDOR’S CORPORATE FASCISTS. THEY MUST BE SAVED !

Pour la première fois, LA MI-ETE VA NOUS LIBERER DE LA VERMINE KLANIQUE !!!

B4 - Any resemblance with etcBefore…

Voici le grand-druide du Banana Gig démasqué. Selon vous, il s’appelle…

1/ Hank Westwood

2/ Willy Ewing

3/ Johnny Savile

4/ Auntie Cryste

5/ Dolphy Rike

6/ Zizy Alair

After - Any resemblance with etcAfter…

Now, ain’t that a hell of a lot sweeter ?…

The Supreme Guardian! Not in my name ¡

Esso = Standard Oil = nazi sponsors

ESSO = ROCKEFELLER = STANDARD OIL = NAZI SPONSORS

« The pre-eminent camps are : Sonofabitch FULD

Son of a bitch FULD, who got us this far (with a little help from his “friends”) Goldman's Blankfein with charitable philanthropist Buffett

Goldman’s BLANKFEIN with “charitable philanthropist” BUFFETT

  • Hill Billies (Big Business/Banking/Politics/Universities/Media/Texas Business);
  • Mandalay (Big Business/Defense Contractors/Politics/U.S. Presidents);
  • Cave Man (Think Tanks/Oil Companies/Banking/Defense Contractors/Universities/Media);
  • Stowaway (Rockefeller Family Members/Oil Companies/Banking/Think Tanks);
  • Uplifters (Corporate Executives/Big Business);
  • Owl’s Nest (U.S. Presidents/Military/Defense Contractors);
  • Hideaway (Foundations/Military/Defense Contractors);
  • Isle of Aves (Military/Defense Contractors);
  • Lost Angels (Banking/Defense Contractors/Media);
  • Silverado squatters (Big Business/Defense Contractors);
  • Sempervirens (California-based Corporations);
  • Hillside (Military—Joint Chiefs of Staff);
  • Idlewild (California-based Corporations) » (Wikipedia)

Bitcho World savior BITCHO with war criminal KISSINGER

Smart Protectionism !www.exposebohemiangrove.org

« There are no formal protests planned this year. However, there are ad hoc groups planning actions on their own. Please use our Facebook page to discuss if you like.

The Bohemian club meets at the grove this year from July 13 to July 28. The first Saturday is always the Cremation of of Care. The second Saturday is the HiJinks (and always a VIP for the Lakeside Talks) and the 3rd Sat. is the LowJInks. They leave on Sunday.

Vishan Seenath, no title (drawing)

There are a few unwanted characters among the crowd. Will you be able to recognize them ?…

(Vishan Seenath, no title / and no link at all to the comments on this page…)

4 Responses to Protest 2013

Constance Dogood says:

June 24, 2013 at 2:44 pm

I have always wondered why protesters gather at the entrance of the grove as opposed to blocking their beach. Their beach lies at Northwood golf course and is easily accessible. It seems a protest that consisted of canoes and kayaks right down the middle of the Russian river (and also right between of both of the Grove beaches) would get a lot more attention.

Jamal Locke says :

June 25, 2013 at 9:53 am

I think that something like that would be hard to organize because it would involved getting boats. But by all means if you want to get some people together to do it, use our FB page to publicize and post here. If you want to discuss on your own site or FB page, post the link here or we can post it for you.

Hasan bin Sober says :

June 29, 2013 at 11:32 pm

Do folks know that the active members of the Grove include the Koch Brothers, Clarence Thomas, Henry Kissinger, Dick Cheney, King Bush I and II, several Republican sens and reps, and that the Koch Bros conduct their own little “by invite only” meetings, which are very involved in choosing Republican presidential candidates?

Seems like there would be a mass of us “commoners” there to close the place down if this was advertised. All that other secret society crap is just a bunch of conspiracy talk. And, yes, I’ve been there at encampment….

Oh, yes, and Clint Eastwood, Jim Belushi, our Sonoma chef Guy Fieiri, Steve Miller, Bob Weir and the Occidental drummer from the Dead, Mickie Hart are members too, smoozing with the rest of the good old boys, complaining about too much tax for the rich….

Jamal Locke says :

July 1, 2013 at 7:03 am

Hasan, whatever you want to organize please do. I’m not sure if it would be effective to “close the place down” like you’re suggesting. My view is that it would be interesting to have things like open debates and discussions in front of the closed enclave. »

Mahmoud Sartre sez :

What if… Just what if ‘conspiracy talk’ was but a notion created by the very authors of conspiracies and propagated by the ignorant or black sheep within the media… I wonder… I sometimes wonder whether, should one of these mass killings “for no reason” a few US gun freaks are so fond of be directed against some of these non-existing secret societies (aiming only at the top of the most fascist among them, of course, yet knowing they’re all interconnected), the “great public” would consider the shooter a madman or a hero… What would Kennedy think ? I then ask myself… Then again, with such a diabolical project in mind, he’d probably not go and advertise it all over the place : one never knows, with all these eyes watching, you know… Not even mentioning the fact they could accuse another country of being behind the attack and start a war… Of course, incumbent Ryan would then be forced to make a speech to the UN, agitating a little drawing with an M in ‘wingdings’ character, ask James Steele to gas a few American civilians with the chemicals he found in Syria, and even have Terminator bring a vial of anthrax into Capitol Hill during the next State of the U in order to convince the taxpayer to embark on yet another exotic journey, but, hey, talking about a come-back… « Com wiz me if you want to get tortured » …

 

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Abantwana bayadlala…

Nelson Mandela

Daar is die aasvoëls, Makaziwe…

Ze dragen camera’s en microfoons, en houden van spektakel.

En wat wegen daartegen de wensen van een man, zelfs één zoals je vader  ?

Kijk… luister… Ze zijn hem levend aan het begraven. Waardevol het vuurwerk afwachtend, uit respect !

You asked them (us) to leave you in peace, but their definition of that word is not yours, nor mine, not even his, it seems…

Prisoner, president, Prime African from the South, has he ever been a man, that father of yours ?

No, he has not, for he is a Man, a man who shined and never backed down.

It is his shining they’re all after, because they know they’ll never be.

Sommiges wil hom gebruik; sommiges wil deur hom gebruik word… You know the song.

Watch them all rise now, hear them say his name, all the National Congressmen, the Marikana  Kampführer, who perverted hid ideals.

They are into power now, whereas power was in him !

¡ La revolución vencerá ! Remember ?…

Ah ça, l’Afrique ne serait pas entrée dans l’histoire ?!

Mais regardez, regardez donc, malotrus !

Pas d’Histoire sans Afrique !

L’Afrique sans murs, et du fric pour tous !…

He had a dream, that man, and as his flame slowly fades, it will reappear as one million little light bulbs illuminating the minds of the poor.

Because they hold the future, in His name !!!…

Madiba, sikelel’ iAfrika…

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UBI macht frei vom Arbeitgeber und macht Arbeit frei !!!

Marcuse

 – LA MINUTE DU MARKETING –

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Lexique

revenu de base inconditionnel = unconditional basic income = allocation universelle :

revenu mensuel de base garanti destiné à remplacer les diverses allocations existantes, dû à chaque citoyen reconnu sur un territoire donné, sans la moindre justification en contrepartie, si ce n’est son appartenance à l’humanité.

En Suisse, où un référendum sera organisé prochainement sur la question, il est proposé que ce revenu s’élève à 2.500 € par mois (un peu moins pour les mineurs d’âge). Le constat général est le suivant : outre le fait que de nombreuses personnes (les femmes ou hommes au foyer, par exemple) travaillent chaque jour sans que leur travail soit reconnu, le chômage de masse est structurel; rien n’y viendra à bout. Plutôt que de s’éparpiller en mesures pour le combattre, toutes vouées à l’échec, comme elles l’ont démontré depuis trente ans, et ainsi susciter de vains espoirs populaires toujours déçus, qui risquent de se transformer en colère, responsabilisons chacun(e) en lui octroyant un revenu de base inconditionnel avec lequel il (elle) pourra assumer au moins tous les besoins fondamentaux destinés à lui assurer la DIGNITE HUMAINE. A charge, pour ceux (celles) qui ne s’en satisferaient pas, de compléter ce revenu par celui que lui procurerait un emploi, dès lors moins stressant, conférant ainsi au travail un cachet de liberté qui modifiera considérablement la donne…

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“[…] UN ETAT DES ETATS-UNIS, L’ALASKA, A DEJA INTRODUIT UN REVENU DE BASE PARTIEL. […]

Mais l’instauration d’un revenu de base n’est pas pertinente que dans les pays riches. L’idée s’est à présent étendue dans les pays en développement du sud. En réalité, il semble que ces pays se placent en position de pionniers dans le débat relatif au revenu de base, ainsi que dans sa mise en pratique !

L’aide au développement, les politiques de croissance économique et d’autres mesures ont échoué à combattre efficacement la pauvreté. Des centaines de millions de gens souffrent encore de la pauvreté et de la faim. Sur base des politiques anti-pauvreté actuelles, cette dernière est vouée à perdurer de nombreuses décennies encore. C’est pourquoi les pays en développement examinent des voies alternatives. Au Brésil, en Namibie et en Afrique du Sud, un revenu de base est à présent considéré par d’aucuns comme le meilleur moyen d’en finir une fois pour toutes avec la pauvreté dégradante. Le Brésil est le premier pays au monde à avoir adopté une loi qui en appelle à l’introduction graduelle d’un revenu de base. En Afrique du Sud et en Namibie, les syndicats, les Eglises ainsi que maintes organisations non gouvernementales (ONG) sont en train de tenter de persuader leurs gouvernements d’introduire un tel revenu. Et, en Namibie, la COALITION POUR L’ALLOCATION D’UN REVENU DE BASE a mené, pendant deux ans, un projet pilote en la matière. Les résultats positifs qu’elle a obtenus ont dépassé toutes les attentes.

En 2011, l’Inde est le troisième pays en développement où des projets pilotes ont commencé à tester la faisabilité du revenu de base.”

http://www.globalincome.org/English/BI-worldwide.html

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“Revenu de base inconditionnel (UBI) :

explorons la voie vers les conditions d’un bien-être social émancipateur dans l’Union européenne”

http://basicincome2013.eu/

ECI - Basic IncomeInitiative de CITOYENS européens !!!

“Suisse: une Initiative pour établir un Revenu de Base pour Tous »

http://globalvoicesonline.org/2012/05/07/switzerland-an-initiative-to-establish-basic-income-for-all/

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Concentration

Cela semble farfelu, mais imaginez que quelqu’un vous demande quel est, selon vous, le mot qui résume le mieux les cent dernières années. Que lui répondriez-vous ? Même s’il pourrait y en avoir d’autres, qui m’échappent pour l’instant, la réponse me semble claire, en ce qui me concerne : concentration…

L’adjectif ‘grande’ accolé au premier conflit mondial qu’a enfanté le siècle dernier souligne à la fois la concentration inédite de moyens mis au service de la destruction des ennemis respectifs et l’accumulation nauséeuse de cadavres que cette logique (car c’est bien de logique qu’il était question) a engendrée. Versailles et la béatitude de Chamberlain et Daladier, motivée par une concentration de capitaux occidentaux antisoviétiques, principalement britanniques et nord-américains, quant aux causes, Hiroshima et son double, quant aux conséquences, ont veillé, dans cette perspective, à rendre ‘40/’45 plus grand encore dans la concentration et la consécration de l’ignominieux, les camps en ayant constitué l’abjecte exaltation post-humaine.

Nonobstant les empires et les monarchies du temps jadis, jamais sans doute, pas même dans l’Antiquité, la concentration de pouvoir n’a été telle qu’elle ne le fut entre les mains du sosie moustachu d’un certain Charlie Chaplin, entre celles du tout aussi moustachu « petit père des peuples », ni même entre celles des auteurs de l’infâme double agression nucléaire originelle. Durant toute la période de la guerre froide, en outre, le sésame nucléaire a concentré les destinées de la planète entre les mains de ses seuls détenteurs.

Depuis que la finance s’est, au milieu des années ’80, sous l’impulsion d’un acteur hollywoodien nommé par un conglomérat à la tête d’une concentration de capitaux avide d’étendre davantage encore son influence, délestée des chaînes de la raison et de la sagesse qui en limitaient la portée socialement destructrice, la concentration de capitaux n’a cessé de s’accentuer, battant des records depuis l’année 2001 (lire l’article chronologiquement précédent).

Ainsi, une étude détaillée de l’université des Nations-Unies, publiée en 2008, souligne d’une part qu’en 2000 déjà, les 2 % les plus riches des Terriens possédaient 50 % des richesses des ménages au niveau mondial, les 5 % les plus riches en détenaient 71 %, et les 10 % les plus riches en recelaient 85 %, tandis que la somme des avoirs de la moitié défavorisée de la population mondiale se limitait à un seul maigre pourcent (1) ! L’étude indique par ailleurs qu’en termes géographiques, l’Amérique du Nord recelait, en 2000, 34 % des richesses mondiales, l’Europe, dont la population est plus de deux fois plus importante que celle de ses vis-à-vis d’outre-Atlantique 30 %, et la frange la plus prospère de l’Asie-Pacifique 24 %, n’en laissant au reste du monde que 12 % (2). Nouveaux exemples en chaîne de concentration sans précédent à cette échelle, qui n’ont fait que s’accentuer et s’accélérer depuis…

Deux mille un fut, dans un autre registre, l’année du coup d’envoi d’une concentration sans pareille du contrôle et de la surveillance des citoyens, qui cherche aujourd’hui son apogée tant dans la coordination de législations nationales pernicieuses qui assurent aux services secrets une concentration de pouvoirs inégalée dans l’histoire (même sous ses pires heures), que dans la conclusion espérée de batteries de liberticides traités de libre-échange (ACTA, etc.). La mondialisation, prétendument garante d’ouverture, n’est en fait que le contexte qui vise, de manière de plus en plus assumée, à garantir à quelques-uns une concentration du pouvoir politique corporatiste et des devises plus nombreuses encore, y compris dans des domaines publics aussi vitaux que les ressources aquatiques. Pour que cette stratégie porte ses fruits, il est non seulement indiqué, pour ses zélateurs, de concentrer le pouvoir médiatique, porteur de la nouvelle bonne parole, de la pensée concentrée et de la propagande concertée, mais aussi de promouvoir l’architecture sociale des réseaux, dans l’absolu vecteurs népotiques de concentration des savoirs par excellence.

Au niveau individuel, le stress glorifié ouvertement comme méthode de gestion, et le détournement médiatico-politique du sens des big bangs intérieurs successifs supposés rappeler à chaque individu, au moins dans le monde dit civilisé, son appartenance à un éther commun, visent, en revanche, à empêcher la seule concentration salutaire, celle qui, faisant fi de la colère émotionnelle (qui se disperse dans le soulagement immédiat), peut seule dessiner les voies intellectuelles et spirituelles susceptibles de permettre à l’humanité de se défaire de la concentration, son principal péril…

Parce qu’Internet peut être, en théorie, à large échelle, l’une de ces voies et que le système concentrationnaire a bien mesuré le potentiel subversif dévastateur que contient l’anti-concentration dont il est le vecteur, ce réseau-là qui, dans la mesure où il est (largement) public, échappe à la logique des réseaux habituelle, est devenu, derrière l’écran des accolades amicales, des sourires convenus et des discours de charlatans, la cible toute choisie de la Réaction.

La Réaction, c’est la concentration, l’organisation, sur le mode religieux, du monopole de quelques-uns. Or, le monopole est une notion d’essence totalitaire dans laquelle ni le libéralisme, ni le progressisme ne trouve son compte. Mais il se trouve que, pour l’heure, un énorme concentré de bêtise, de conformisme panurgique, d’égoïsme consumériste, de lassitude et d’autocensure lui sert d’adjuvant passif. C’est à transformer ce concentré que devra s’atteler l’esprit, par la concentration, si au mouvement de concentration nous souhaitons mettre un terme, fût-il provisoire. Et il est dans notre intérêt de ne pas perdre de temps, car la moissonneuse-batteuse concentrationnaire n’attend pas…

>>> http://www.veoh.com/watch/v199571086tMbhgkd?h1=The+Masque+of+the+Red+Death+%281964%29

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(1)   Source : UNU-WIDER, World Distribution of Household Wealth, 2008, p. 9

(2)   Ibid., pp. 13 – 14

 

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Murdoch, Fart Head, Mittal, etc. : « ILS ONT DES NOMS, DES ADRESSES » !

Buffett

Carlos Slim

Mittal

AK-47

Murdoch

Fart Head

Pures, les intentions… Pures, sinon ça ne marche pas !

Perspective à affiner

« Le magazine Forbes vient de publier l’édition 2013 de sa liste des milliardaires. Cette année, 210 nouveaux (très) riches entrent dans le classement, portant le nombre de milliardaires à 1.426 de par le monde. Profitant des revenus de leur capital, CES MAGNATS S’ENRICHISSENT INSOLEMMENT d’une année [à] l’autre [tandis que des milliers de gens crèvent de faim], puisque leur petit pactole commun s’élève désormais à… 5.400 milliards de dollars, contre «seulement» 4.600 milliards en 2012. [Toujours selon Forbes, il était de 2.160 milliards de dollars en 2000 !]

Sans surprise, les Etats-Unis restent un eldorado pour milliardaires, abritant 442 membres du club. Suivent les régions Asie-Pacifique, l’Europe, les Amériques et, en queue de peloton, l’ensemble Moyen-Orient-Afrique.

Sur ce dernier point, Slate.com a néanmoins réalisé un classement plus original. Il s’agit cette fois de classer les pays non plus par nombre de milliardaires, mais par la proportion qu’ils occupent dans la population. Rapporté à la taille de la population, le classement est le suivant (le premier chiffre entre parenthèses correspond au nombre de milliardaires, le second au nombre d’habitants):

  • 1. Monaco (3/35.427)
  • 2. Saint Kitts et Nevis (1/53.051)
  • 3. Guernesey (1/65.573)
  • 4. Hong Kong (39/7.1 million)
  • 5. Belize (1/356.600)
  • 6. Chypre (3/1.1 million)
  • 7. Israël (17/7.8 million)
  • 8. Singapour (10/5.2 million)
  • 9. Koweit (5/2.8 million)
  • 10. Suisse (13/7.9 million)

Evidemment, ce qu’ont en commun ces très petits pays est d’être considérés à des degrés divers comme des paradis fiscaux, en tout cas pour au moins huit d’entre eux. Ainsi sur les 10, seul le Koweit n’est pas répertorié sur l’une des listes noires des organisations et seul Israël a un niveau de secret bancaire certes élevé, mais comparable à ceux de la France ou du Canada, si on se fie au classement de l’indice de secret bancaire du site Financial Secrecy Index. »

http://www.slate.fr/lien/69037/classement-pays-nombre-milliardaires-habitant

FDR

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« La mort dans la plume »

Huit ans ! Cela devait faire une huitaine d’années que Samuel s’était calfeutré dans son isolement. S’il sortait, c’était uniquement pour faire de nouvelles provisions au supermarché du coin. Il disait bonjour à ses voisins, répondait aux courriers que lui envoyait les diverses administrations publiques, renvoyait ses formulaires d’impôt, remplissait l’essentiel de ses devoirs de citoyen, mais était, pour le reste, de ces hommes devenus invisibles. A l’image de ce chiffre complexe qui fait s’entrelacer deux zéros, son odyssée personnelle traduisait non pas le chaos, mais une indescriptible routine, un parcours attendu qui n’en était pas un, en réalité, et qui toujours l’amenait, tel un Sisyphe contemporain, à suivre un mouvement identique, sans allégresse ni surprise aucunes, avec détachement et résignation.

Ce qui avait provoqué cet état ? S’en souvient-il encore, lui qui auparavant ne jurait que par la fougue, la passion et l’éclat ? Peut-être était-ce le décès de son père, ce monstre froid en apparence, sur la dépouille duquel il s’était penché durant de longues minutes d’effroi, contemplant une mort si proche et pourtant si lointaine, ou encore le dédain que lui manifestèrent dans la foulée ceux qu’il croyait pourtant ses parents, ses amis, bref l’indicible peine qu’il avait ressentie face à ce grand vide… Qui le dira ? Une chose est sûre : il n’était plus le même : perclus de doutes, de tourments puissants, il n’avait de cesse de réconcilier les forces qui, en lui, comme un magma en ébullition, avaient raison de la plus grande part de son énergie.

Son époque, il ne la comprenait plus, encore moins ses acteurs. Et ce terme, d’ailleurs, n’était pas sans l’interroger. L’acteur, en effet, n’est-ce pas  à la fois celui qui agit et celui qui prétend ? Tout lui semblait caduc, vaines prétentions, autosuffisance clanique. Tous ceux et toutes celles qu’il pouvait croiser sur sa route, au hasard d’un instant, les conversations mécaniques dont il percevait des bribes, les rites et les mises en scène cérémonielles, les pseudo-débats orchestrés par le tube cathodique, tout était devenu superficiel, tout ouvrait la voie à un abîme plus grand encore.

Fixation, tel est le terme. En un mystérieux paradoxe, le mouvement apparent de tous ces êtres, de plus en plus nombreux, à en croire les statistiques, lui semblait coulé dans le marbre : un petit tweet par-ci, un petit SMS par-là, un concert de mièvreries, la lutte sans fin d’egos en tous points déroutés, la suprême concurrence du sordide, bref une nature morte mais en effervescence ! Peut-être s’était-il employé, toutes ces années durant, à tenter de comprendre cette trame qui semble ne plus autoriser le moindre recul, la moindre perspective, et confine l’imaginaire et la profondeur au néant…

Le passage à trépas de son père avait été subit. Il n’y avait pas assisté, on le lui avait relaté. Le vieux se serait assis dans son fauteuil en conclusion d’une rude journée de labeur dans les champs, puis, pris d’un spasme soudain, il aurait levé les bras au ciel pour signifier une douleur, comme, à certains égards, le font les charismatiques, une tribu qu’il abhorrait pourtant, et se serait brusquement éteint. A cela s’ajoute une piquante anecdote : à la télé était rediffusé au même moment le classique « Le ciel peut attendre »…

Là s’arrête la parabole, car le vieux, si l’on faisait abstraction de ses écarts de langage et de son tempérament bougon, était tout sauf un diable : fidèle en amour comme un cygne à sa compagne, il était par ailleurs plus que robuste à l’ouvrage : agriculteur, il considérait son métier comme un sacerdoce et, du matin au soir, labourait, pour ainsi écrire, son sillon, veillait sur ses arbres fruitiers comme sur ses petites pousses, cajolant ainsi sa future récolte. C’est bien simple : le voisinage entier le considérait comme un architecte de la terre. Sur son passage, les mauvaises herbes frémissaient, les limaces prenaient la poudre d’escampette et, s’il arrivait à moineaux, mésanges et merles de feindre de se moquer, tous prenaient bien soin de garder leurs distances. Au gré des saisons, il semait et cultivait avec la rigueur de l’horloger et son atelier à ciel ouvert avait, toutes proportions gardées, des airs d’orangerie versaillaise.

Son départ inopiné fut pour Samuel un coup dur. En guise de thérapie, ce dernier entreprit, pendant quelques mois, de se familiariser avec la besogne de son paternel décédé, mais se rendit bien vite à l’évidence : pareille affaire ne lui était pas destinée. Titulaire d’un diplôme universitaire, il était, aux yeux de tous, le premier intellectuel de la famille, encore qu’il convienne de prendre avec des pincettes cette qualification. Face à l’insistance de sa mère, il avait étudié le droit, mais vouait à présent à cette discipline un tenace mépris. Il voulait devenir écrivain, et en avait sans doute les oripeaux, mais son énorme flemme et son appréhension des critiques le confinaient à l’anonymat.

Il m’avait donné à lire un jour une ébauche de roman, un récit de science-fiction aux allures de prophétie futuriste que je ne savais comment interpréter, car l’action s’y situait au présent. Un antihéros solitaire bien de notre temps y était confronté à une sorte de matrice télévisuelle qui semblait tout savoir de lui (ou presque), le menait par le bout du nez (ou en avait la prétention), excitait ses pulsions animales, l’incitait à se laisser dompter et surveillait le moindre de ses faits et gestes. Comprimé par un cube métaphorique aux allures toujours changeantes, à un labyrinthe dédalique peuplé d’acteurs tous très semblables, le personnage principal envisageait le suicide comme la seule porte vers la liberté dans une réalité technologique désertée par l’humanité.

D’autres personnes ont lu son manuscrit, avant qu’il ne le réécrive à grand peine, se poussant dans ses propres retranchements. Quelques encouragements exceptés, l’une ou l’autre bonne note aussi, il reçut un chapelet de critiques frivoles ou vitriolées, qui démolirent tant le brouillon que le genre lui-même, et eurent tôt fait de le décourager. Certains de ces détracteurs occasionnels cherchaient sans doute à prendre une revanche sur une déculottée passée, tandis que d’autres, plus sincères, invitaient à passer de l’esquisse à l’œuvre. Ces observations, il ne les a perçues que comme des coups de boutoirs supplémentaires dans son âme sensible, quelques morsures de plus dans sa carcasse de mal-aimé, et a fini par se demander quel pouvait bien être, au-delà de l’écriture comme fin en soi ou comme exutoire personnel, l’intérêt de cette curieuse pratique qui consiste à coucher sur le papier ses expériences travesties, ses sentiments camouflés, s’il s’avérait impossible de les partager de quelconque manière, si était inéluctable la critique assassine et si l’exercice entier était destiné à se soumettre aux implacables lois du marché, où les livres de cuisine tiennent désormais le haut du pavé.

Ma première rencontre avec lui remonte à un an. C’était dans le métro, je m’en souviens encore. De ses yeux distants mais expressifs semblait se dégager une lueur tumultueuse qui, quasi instantanément, a attiré mon regard dans son prisme. Une partie de bras de fer visuelle s’ensuivit : qui fixerait l’autre le plus longtemps ? Sa mâchoire serrée, loin de tout romantisme, semblait m’enjoindre de regarder ailleurs, de le laisser en paix et de m’intéresser à l’un ou l’autre des voyageurs indifférents et hagards qui peuplaient le véhicule. Son regard était empli de projectiles qui n’avaient d’autre but que d’assassiner mon intérêt pour lui. Sa détermination, que traduisait son visage tout de haine surfaite, était telle qu’il a remporté la partie aisément. La station Etangs noirs fut l’occasion d’un nouvel échange furtif, couplé cette fois, de sa part, à un sourire cynique. J’en eus froid dans le dos : cet inconnu commençait à m’inquiéter. Il ne restait que quelques stations avant que je n’arrive à destination, et je ne m’en plaindrais sûrement pas. Lorsque tel fut le cas, il me regarda une nouvelle fois, vit que je m’apprêtais à sortir et soudain se leva, s’approcha de moi et enfonça une main dans la poche droite de son ample tweed noir. Je pensais que venait de sonner ma dernière heure, ma gorge se noua, quelques perles de sueur glissèrent sur mon front écarlate. Il me faisait face, à présent, et sortit calmement de sa poche un stylo.

          File-moi ton numéro !

Tout à coup, j’hésitais. Si j’avais été un chien, j’aurais eu la queue entre les jambes.

          Euh, on se connaît ?

          File-moi ton numéro ! répéta-t-il, imperturbable.

Un instant, j’envisageai de lui donner un faux numéro, mais c’était comme si je n’osais pas. Je lui donnai ce qu’il demandait, espérant qu’il perdrait la succession de chiffres quelque part sur la route, ou que, juste désireux de me tester, il s’en débarrasserait sitôt rentré. Neuf mois plus tard, je reçus un coup de fil d’un appelant non identifié.

          Salut, c’est Samuel.

          Samuel ?

          L’inconnu que t’as rencontré dans le métro il y a quelques mois et à qui t’as filé ton numéro de G…

Je n’en revenais pas. Quel était cet extraterrestre ? Qui était ce fou ? Il me fallait l’éconduire à tout prix : c’était, de toute évidence, le genre de mecs qui vous créent des problèmes.

          Je ne me souviens plus, non. Où avez-vous obtenu mes coordonnées, Monsieur ?

          Paniques pas…

J’étais démasqué. De deux choses l’une : ou je raccrochais ex abrupto, ou je lui fixais rendez-vous dans un lieu public, le plus éloigné possible de mon domicile.

          Je me souviens maintenant, désolé. Ca te dit d’aller boire un verre ?

          C’est une idée, oui…

          Samedi qui vient, vers vingt heures, ça te convient ?

Ca lui convenait, en effet. Je pense que tout ce que j’aurais pu lui suggérer lui aurait convenu, de toute façon. C’est à la brasserie L’Ecume des Jours, à Waterloo, que nous nous rencontrerions.

Le jour dit, morne plaine, point de Samuel à l’horizon ! Cet abruti m’avait berné et m’avait fait parcourir plusieurs kilomètres avec la vieille bagnole déglinguée de ma petite sœur pour les couilles du pape ! Je m’en retournai chez moi dépité et soulagé à la fois : mieux valait cela qu’un épilogue tragique ! Vers deux heures du matin, on sonna à ma porte. Peu coutumier de visites nocturnes impromptues, j’enrageai que mes rêveries fussent ainsi interrompues, mais, de nature serviable et vu l’insistance du gougeât plaisantin, je me dirigeai vers ma fenêtre et aperçus une silhouette qui ne m’était pas familière.

          C’est Samuel !

          Pardon ?

Il s’était laissé pousser les cheveux, mais sa personnalité, elle, n’avait pas changé d’un iota.

          Attends, mais comment tu sais où j’habite ? Et qu’est-ce que tu viens faire ici à cette heure-ci ?

          Relax, j’avais complètement oublié notre rendez-vous, et je voulais venir te présenter mes excuses.

          Mais t’es dingue, mec.

Il se garda de répondre à ma première question et, comme je voulais éviter qu’il en vienne aux mains ou saccage la porte d’entrée de mon immeuble, je n’insistai pas.

          Tu m’ouvres ?

          Attends, mais tu déconnes ? T’as vu l’heure qu’il est ?

          T’es réveillé, non ?

Jamais je n’avais rencontré un type avec un tel culot, un tel réceptacle de vanité. Que ferais-je ? Je me munis du gros rouleau à pâtisserie vermoulu qui faisait office de piètre objet de décoration dans mon salon et lui ouvris la porte. Je l’entendis gravir les escaliers trois à trois et vis son ombre s’insinuer derrière la vitre opaque de la porte de mon appartement. J’étais fébrile, mais je pris mon courage à deux mains…

          T’es vraiment bizarre comme gars, on t’a déjà dit ça ?

          Bizarre, comment ça ?

          Aucun inconnu n’a encore débarqué chez moi à deux heures du matin.

          Excuse, je suis complètement déphasé.

Je m’enquis des raisons de son décalage horaire et appris qu’il était scribouillard et que l’inspiration ne lui venait que la nuit. Si ça ne l’excusait pas, ça expliquait en partie sa curieuse présence, même si j’ignorais encore comment il avait pu me localiser. Je l’invitai à s’asseoir, et nous discutâmes une heure, une deuxième, puis une troisième, jusqu’à ce que soient perceptibles les premières traces de l’aube : une fois qu’on le connaissait, Samuel devenait étonnamment volubile. Ensemble, nous nous sommes adonnés à quelques jeux d’écriture. Ainsi, il m’a initié à l’écriture automatique. Je ne me souviens plus vraiment de l’objet de sa rédaction improvisée, qui partait dans tous les sens, mais, en ce qui concerne ma plume, elle devait être très légère, volante même, après le premier joint que nous partageâmes, car elle donna vie à un aigle géant, ressuscita Lindbergh et alla jusqu’à me propulser parmi les astres.

Je pris congé de mon invité, après que nous nous fûmes promis de nous revoir, et comme, dans l’état qui était le mien, il valait mieux ne pas insister, j’appelai le bureau pour signifier à mes collègues mon indisposition passagère, sans en dévoiler les causes, cela va sans dire. Je m’allongeai sur mon lit aux draps à moitié défaits et m’assoupis comme une masse inerte. Lorsque je revins à moi, une poignée d’heures plus tard, je m’empressai de prendre un bon bain revigorant et, tandis qu’éclataient devant moi les frêles bulles auxquelles avait donné naissance mon gel douche, j’entendis la radio crépiter : « nouvel épisode tragique dans l’histoire de l’aviation : un Boeing 747 de la compagnie Pan Am s’est écrasé sur l’île de Maui. Bilan : trois cents trente-six morts et soixante-six disparus »… Mon sang se glaça dans la baignoire d’eau bouillante : ma sœur et moi venions, en prévision des vacances d’été, de réserver nos tickets pour Hawaï !

Je revis Samuel deux semaines plus tard, dans un bar branché de la capitale où je me trouvais par hasard en compagnie de ma sœur et de l’une de ses conquêtes. Les enceintes y étaient si puissantes que la pseudo-musique qu’elles crachaient enveloppait sans peine toute amorce de conversation, rendant cette dernière inintelligible, en conséquence de quoi nous convînmes d’une nouvelle rencontre, dont son appartement overijsois serait cette fois le théâtre…

          Tu as trouvé facilement ?

          Sans trop de mal : je me balade assez souvent ici en vélo.

          Pour un citadin irréductible, c’est le bagne. Moi, j’y trouve le repos. Et, le matin, j’adore me laisser bercer par le gazouillis des oiseaux dans les arbres, qui, quoique confus, parvient toujours à composer une singulière mélodie.

          La première fois que je t’ai vu, tu ne me donnais vraiment pas l’impression d’être un poète…

          C’est parce que je n’en suis pas un !

          Tu es quoi, romancier, alors ?

          Pas même ! Ou plutôt, ce ne sont là que couvertures d’apparat, masques de scène, conventions langagières, qualifications para-professionnelles. En réalité, je suis un tueur, un assassin.

          En toute sincérité, c’est l’impression que tu me donnais, dans le métro.

          C’est plus qu’une impression, mon ami. C’est la triste réalité qu’il me faut assumer contre mon gré.

A travers une multitude de circonvolutions de l’esprit et de raccourcis scabreux, il se lança dans une interminable dissertation métaphysique, où vie et mort se confondaient à travers ce qu’il appelait la nature morte du vivant moderne, selon laquelle nous nous inscririons tous malgré nous dans une nouvelle forme de déterminisme scénarisé auquel nous sommes susceptibles de contribuer moyennant l’utilisation d’une part de notre âme en guise d’encre pour notre plume. Indéniablement, son esprit planait dans l’un de ses délires.

          T’as de nouveau fumé la moquette ? lui dis-je.

          Ne déconne pas, c’est sérieux, mais ton cartésianisme classique t’empêche encore d’en prendre la mesure.

          Explique-toi…

          L’autre soir, ta plume s’est envolée vers les cimes, a construit un aigle géant et couché Lindbergh sur le papier. Lindbergh est décédé à Maui, vieux. Et, à peine quelques heures plus tard, ton grand aigle s’est crashé avec lui.

          Attends, t’es sérieux, là ? C’est du pur hasard, mon pote.

          Tu y crois donc encore ?

          Et toi, tu crois en quoi ? En l’interconnexion globale par le battement d’ailes du papillon ou, en l’occurrence, le gribouillis d’une plume sur un parchemin chloré ?

          J’essaie de penser… Nous vivons une époque formidable… Et puis, il n’est pas question de gribouillis, mais d’âme, je te l’ai déjà dit. A priori, établir sa liste de courses n’a aucune incidence sur le cours de l’humanité.

          Tu vas trop loin, mon pote. Pour rester dans ta logique, qu’est-ce qui te prouve que ma main et ma plume d’un soir, au lieu d’être les prophétesses d’une tragédie à venir, n’étaient pas toutes deux guidées par un événement déjà inscrit dans les astres, dont je n’aurais été que l’insignifiant messager ?

          Exactement, à ceci près que ton scénario à toi est plus déterministe encore et qu’il ne laisse entrevoir ni pour les humbles créatures qui nous entourent, ni pour nous même, aucune sortie de secours, aucune échappatoire…

A ce dernier sophisme – ainsi le percevais-je –  je ne pus opposer que mon silence. Sans doute étais-je trop las. Sans doute ce monde qui nous abrite ne compte-t-il pas deux Samuel, et cela vaut-il probablement mieux. Quoi qu’il en soit, s’il disait vrai, si sa plume était réellement une arme virtuelle susceptible de provoquer les pires ravages, rien n’indiquait qu’il ne fût possible de la transformer en papillon volage, en outil de sagesse, en cygne majestueux. Modeler une pâte ingrate, lui donner forme, voilà sans doute le colossal ouvrage pour lequel il requérait mon assistance. Mais pourquoi moi ?…

____________

Tenter d’écrire une historiette sensée, originale et captivante en 15.000 caractères, voilà la gageure soumise il y a un an par un célèbre concours de nouvelles. N’y étant, à mon sens, pas parvenu, j’ai réservé ma tentative à mon blog…

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Sondage atypique…

Vous habitez Uccle (côté Prince d’Orange) ou les Hauts-de-Seine ? Vos voisins politically correct vous tapent sur les nerfs ? Vous rêvez de leur jouer un tour et vous disposez de baffles surpuissants ? Mais l’aspect scientifique de la démarche vous intéresse aussi… Ceci s’adresse à vous !

Suivez bien les instructions ci-dessous ; l’effet sera saisissant !

1/ Attendez que le jour soit tombé.

2/ Ouvrez bien grand vos fenêtres.

3/ Mettez le volume au maximum.

4/ Appuyez sur ‘play’.

PRET(E)S ?

3 > 2 > 1

“Biyâ berim dasht.”
“Kodum dasht?”
“Hamun dashti ke khargush-na dâre, ây bale!”
“Bacche sayyâb be pâyash tâb dâre, ây bale!”
“Bacche sayyâb-râ mazan, khargush-e dashtom râ mazan,
Khâb-e khargush be khâb-e yâr mimunad, bale,
Khâb-e khargush be khâb-e yâr mimunad, bale!”

“Let’s go to the field.”
“Which field?”
“The same that has rabbits, oh yes!”
“And my dog has a rope on its foot, oh yes!”
“Don’t kill my dog on the leash nor my rabbits in the field,
For the dream
of the rabbit reminds me of the dream of my lover, oh yes!”

***

“Biyâ berim kuh.”
“Kodum kuh?”
“Hamun kuhi ke âhu-na dâre, ây bale!”
“Bacche sayyâb be pâyash tâb dâre, ây bale!”
“Bacche sayyâb-râ magir, khargush-e dashtom râ magir, âhu-e kuhom râ magir,
Khâl-e âhu be khâl-e yâr mimunad, bale,
Khâl-e âhu be khâl-e yâr mimunad, bale!”

“Let’s go to the mountain.”
“Which mountain?”
“The same that has deer, oh yes!”
“And my dog has a rope on its foot, oh yes!”
“Don’t kill my dog on the rope, nor my rabbit in the field, nor my deer of the mountain,
For the grace
of my deer reminds me of the grace of my lover, oh yes!”

***

“Biyâ berim bâgh.”
“Kodum bâgh?”
“Hamun bâghi ke ghomri-ta dâre, ây bale!”
“Bacche sayyâb be pâyash tâb dâre, ây bale!”
“Bacche sayyâb-râ mazan, khargush-e dashtom râ mazan, âhu-e kuhom râ mazan, ghomri-e bâghom râ mazan,
Charkh-e ghomri be charkh-e yâr mimunad, bale,
Charkh-e ghomri be charkh-e yâr mimunad, bale!”

“Let’s go to the garden.”
“Which garden?”
“The same that has pheasants, oh yes!”
“And my dog has a rope on its foot, oh yes!”
“Don’t kill my dog on the leash, nor my rabbit in the field, nor my deer of the mountain, nor my pheasants in the garden,
For the amble
of the pheasant reminds me of the amble of my lover, oh yes!”

***

“Biyâ berim châh.”
“Kodum châh?”
“Hamun châhi ke koftar-na dâre, ây bale!”
“Bacche sayyâb be pâyash tâb dâre, ây bale!”
“Bacche sayyâb-râ mazan, khargush-e dashtom râ mazan, âhu-e kuhom râ mazan, ghomri-e bâghom râ mazan, koftar-e châhom râ mazan,
Tâb-e koftar be tâb-e yâr mimunad, bale,
Tâb-e koftar be tâb-e yâr mimunad, bale!”

“Let’s go to the well.”
“Which well?”
“The same that has pigeons, oh yes!”
“And my dog has a rope on its foot, oh yes!”
“Don’t kill my dog on the leash, nor my rabbit in the field, nor my deer of the mountain, nor my pheasants in the garden, nor my pigeons at the well,

For the flight of the pigeon reminds me of the flight of my lover, oh yes!”

***

“Biyâ berim kuh.”
“Kodum kuh?”
“Hamun kuhi ke oghâb-ta dâre, ây bale!”
“Bacche sayyâb be pâyash tâb dâre, ây bale!”
“Bacche sayyâb-râ mazan, khargush-e dashtom râ mazan, âhu-e kuhom râ mazan, ghomri-e bâghom râ mazan, koftar-e châhom râ mazan,
Chang-e oghab be chang-e yâr mimunad, bale,
Chang-e oghab be chang-e yâr mimunad, bale!”

“Let’s go to the mountains.”
“Which mountains?”
“The same that have eagles, oh yes!”
“And my dog has a rope on its foot, oh yes!”
“Don’t kill my dog on the leash, nor my rabbit in the field, nor my deer of the mountain, nor my pheasants in the garden, nor my pigeons at the well,
For the clutch
of the eagle reminds me of the clutch of my lover, oh yes!”

***

“Khâb-e khargush be khâb-e yâr mimunad, bale,
Khâl-e âhu be khâl-e yâr mimunad, bale,
Charkh-e âhu be charkh-e yâr mimunad, bale,
Tâb-e koftar be tâb-e yâr mimunad, bale,
Chang-e oghab be chang-e yâr mimunad, bale,
Chang-e oghab be chang-e yâr mimunad, bale,
Chang-e oghab be chang-e yâr mimunad, bale,
Chang-e oghab be chang-e yâr mimunad, bale!”

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Besoin d’utopie douce…

27 ½ x ­|- _ = 7² x 22/7. Eureka !

Mais que me dites vous-là ?

Mon bon Monsieur, c’est le réel !

Allons donc, mais lequel ?

 ***

Celui de demain, celui de l’avenir

Croyez-vous ? Ce n’est dont pas π ?

Ce sera pis avant d’être meilleur, sire…

Aux oubliettes, De Vinci ?

 ***

Sort putatif, mais fortuit !

Mais quel est donc ce pataquès ?

Qu’est-ce que la flamme, ai-je ouï ?

L’Evangile nouveau, la nouvelle messe ?

Exit le brouillard de l’esprit !

 ***

Mais vous me parliez de réel…

Conventions sectorielles, mon bon…

Et cette mire sonique, soudaine sidération ?

Entre états, une passerelle…

 ***

Une Renaissance, vous voulez dire…

Qu’allez-vous donc insinuer ?

Que le réel, il faut le lire !

Cher ange, voyons, c’est un empire !

 ***

Aux carences rédhibitoires !

Il est question de territoires…

Sacrée alors, cette règle d’or ?

Ou incantatoire, allez savoir…

D’une inflexion fort péremptoire !

 ***

Qui trouve ses thuriféraires…

Et leurs ivresses comminatoires !

Pour vous, dessein crépusculaire…

Dénué d’imaginaire, le rêve est illusoire…

 ***

Maudissez, nous bâtissons !

Une tente de fortune !

Mieux vaut cela qu’aucune…

Cela, nous le verrons…

 ***

A quelque chose, avenir sera donc bon…

Sans aucun doute, c’est nous qui le forgeons !

Comme les écuries, cette civilisation…

Trêve de sensiblerie, tous les coqs sur le pont !

Guettant l’iceberg, sans autre hésitation !

 ***

Allez-y donc, percolez de votre adamantin éclat…

Ne personnalisez donc pas !

Mais n’est-ce pas là ce à quoi votre génie aspire ?

Qu’en savez-vous, de mon génie et de ça ?

 ***

Tout ce qu’il y a à en savoir, je le sais !

Pardi, c’est l’omniscience, dame ! C’est le festin…

Et vous, le fanatisme, abside familière du vrai !

Moi, je sais que j’ai soif, et que d’autres ont faim…

« Si notre ambition est de changer le monde, les images doivent changer. Aujourd’hui, l’artiste a un rôle très important à accomplir. Il n’est pas un petit acteur périphérique qui distrait les riches ; il est réellement indispensable. »

Writer & theater producer Vaclav Havel Vaclav Havel

(1936 – 2011)

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